Beaucoup taquinent gentiment le MR depuis que Bart De Wever a aimablement lancé que « plus personne ne veut du MR au gouvernement ».

A juste titre: après avoir renié ses promesses de campagne, le MR a gouverné plus de quatre ans avec ce parti séparatiste, au prix élevé que l’on connaît en matière de droits des migrants et de prise de pouvoir des nationalistes dans les leviers de l’Etat fédéral. Et malgré cette prise de risque, la N-VA a largué les amarres en décembre 2018, nous plongeant dans la situation actuelle. Et se propose de larguer le MR aujourd’hui – alors que ce parti, depuis un an, privilégie à chaque fois les formules de coalition impliquant la N-VA (oui, c’est vraiment trop injuste).

J’emploie souvent – la presse s’en est fait l’écho – la fable de la grenouille et du scorpion pour décrire la problématique des relations entre la N-VA et les partis démocratiques, en particulier francophones. Le scorpion finira toujours par trahir et frapper la grenouille, quoiqu’il dise, même s’il est sincère, parce que c’est sa nature. En l’occurence : c’est dans la nature de la N-VA de privilégier toujours l’identitaire sur l’économique, le nationalisme sur la santé, l’irrationnel sur le pragmatisme. Et ça ne changera pas, tant que ce parti n’aura pas résolu sa crise d’identité interne – larvée mais réelle – entre nationalistes pur jus proches de l’extrême droite d’une part, et tenants d’une droite conservatrice respectable. d’autre part. Et le jour où ce confit émergera, il vaudra mieux pour tout le monde que ce parti ne gouverne pas.

Mais ce qui vaut pour le MR hier vaut aussi pour le PS, le cdH et éventuellement Ecolo demain: accepter un accord de gouvernement avec la N-VA, alors qu’elle est mathématiquement contournable, c’est vendre son âme et reprendre le rôle de la grenouille et accepter de se faire trahir un jour. La crise sanitaire et économique demande certes un gouvernement d’urgence; mais en créer un en cédant, par exemple, sur des réformes institutionnelles dont personne n’est aujourd’hui demandeur, et sans passer par une consultation des secteurs concernés, serait un prix bien trop lourd. La meilleure manière de donner à notre pays les moyens de lutter contre cette pandémie est d’arrêter de passer l’été à tourner autour des nationalistes, et d’avancer sans eux.

Nous ne soutiendrons aucun accord de gouvernement incluant la N-VA, pour toutes ces raisons, que ce soit le MR, le PS ou n’importe qui d’autre qui s’en porte garant, parce que tout dans l’identité de DéFI nous en empêche. Même si cela est plus facile à dire lorsqu’on ne pèse que deux députés, nous ne changerons pas d’avis, quitte à être les derniers et les seuls sur cette ligne. Et ce d’autant, encore une fois, que des alternatives existent, non examinées par les égos des grands partis depuis plus d’un an.

Puisse la douche froide subie par le MR ces jours-ci faire enfin office de détonateur. Et puissent les autres partis démocratiques, en particulier le PS, ne pas vendre leur âme à leur tour.

François De Smet