Ce lundi 14 décembre, DéFI organisait un webinaire sur la face cachée de l’énergie verte. Cette énergie verte a un coût humain, environnemental, économique… que nous ne pouvons pas ignorer. Ce webinaire a été l’occasion de se pencher sur ces coûts, locaux mais aussi globaux, de l’extraction des minerais à leur recyclage. L’occasion d’effleurer la complexité de l’énergie verte et de se poser les bonnes questions. Nous remercions encore nos intervenants : Mme Claire Mathot (ONG Justice et Paix), M. Aymar Nyenyezi Bisoka (Professeur, UMons), M. Benjamin Colas (Administrateur délégué du groupe Wilmet) et M. Romain Gelin (Chercheur, GRESEA). Ce webinaire a été organisé en collaboration avec l’ONG Justice et Paix à l’initiative des députés bruxellois DéFI, Mme Nicole Nketo Bomele et M. Jonathan de Patoul, avec le soutien de M. Christophe Verbist (Directeur du CEJG) et l’aide précieuse de toute l’équipe de communication de DéFI.
Pour reprendre l’expression de Christophe Verbist : « En matière d’énergie verte, il nous faut passer de l’autre côté du miroir. » Et passer de l’autre côté du miroir, c’est découvrir la face cachée de cette énergie verte qui occupe une place de plus en plus importante dans nos vies. DéFI a donc souhaité passer de l’autre côté pour tenter de mieux comprendre ce côté, inconnu parfois, de l’énergie verte.
Au commencement étaient les minerais…
Les minerais sont au cœur de la transition énergétique. Les principaux pays producteurs de minerais sont la Chine, le Canada, la Russie, l’Australie et la République démocratique du Congo (RDC). Ces minerais sont omniprésents dans notre vie quotidienne. Claire Mathot (ONG Justice et Paix) a rappelé qu’on en retrouve dans nos batteries de vélos et de voitures électriques, dans les composants des smartphones, dans les éoliennes… Ces minerais ont un coût environnemental et humain. La demande en minerais explose. Et les ressources ne sont pas inépuisables. Leurs conditions d’extraction peuvent être effroyables. Cette richesse peut entraîner de la corruption, l’exode de population, de la pollution de la flore et de la faune…
La situation est inquiétante en RDC, qui regorge de quantités exceptionnelles de minerais. Et M. Aymar Nyenyezi Bisoka (Professeur, UMons) souligne que malgré une croissance économique d’environ 6 % par an, la population congolaise ne profite pas toujours des retombées économiques de l’extraction des minerais des sous-sols de la RDC. Quant aux conditions d’extraction, M. Nyenyezi Bisoka évoque des « minerais de sang ».
La tentation du silence au sein de la communauté internationale
Les enjeux géostratégiques, diplomatiques, économiques et politiques autour des minerais sont gigantesques. Ils en arrivent parfois à faire oublier les enjeux plus locaux et les souffrances « là-bas ». De très nombreux États, en Europe et ailleurs, soucieux de s’assurer une sécurité d’approvisionnement, ferment les yeux sur les manquements graves aux droits des travailleurs et sur des violations parfois massives des droits humains. Pour nos intervenants, il est nécessaire de sortir de la logique qui prévaut d’exploitation des richesses de sous-sols et de penser de manière plus globale. Devons-nous perpétuer une vision parfois déterministe dans nos rapports à d’autres pays ? Comment passer d’une logique d’exploitation à une logique plus égalitaire ? Une économie plus verte ici mais fondée sur l’injustice ailleurs est-elle acceptable ?
Le recyclage de ressources finies pour des besoins infinis
La question du recyclage a été abordée par M. Benjamin Colas. Recycler, c’est tenter de prolonger la vie des minerais en leur donnant une seconde jeunesse. Recycler, c’est aussi respecter la dignité des travailleurs qui font ce recyclage. Et recycler dans la dignité, c’est une occasion de faire fonctionner l’économie circulaire et de créer de l’emploi. Les filières de recyclage locales sont aussi un + pour l’environnement et le développement durable, avec des coûts moins élevés.
Et si on revenait à une plus grande sobriété ?
Pour M. Romain Gelin, nous devons remettre en question nos modes de consommation et en revenir à plus de sobriété. Il est nécessaire de consommer moins ou mieux, c’est-à-dire de favoriser le « low-tech » en faisant le choix du moins puissant, du moins énergivore. Exemple : entre un vélo sans assistance électrique et un vélo avec assistance électrique, faisons le choix du premier si nous le pouvons. On doit aussi réfléchir à créer une nouvelle fiscalité qui pénaliserait les véhicules qui polluent le plus. Il propose quelques pistes de réflexion, notamment une loi contre l’obsolescence programmée. Il insiste aussi sur la nécessité d’isoler les bâtiments et sur la nécessité d’une plus grande efficacité énergétique.
Bref, ce webinaire fut l’occasion d’échanger et d’apprendre sur une énergie verte peut-être pas si verte que cela, et sur laquelle chacun(e) doit réfléchir en pensant à ici mais aussi à « là-bas ».